Une nouvelle étude menée en Chine révèle que les infirmières du monde entier sont confrontées à des niveaux importants d’épuisement professionnel. En dix ans, le nombre d’infirmières souffrant d’épuisement professionnel n’a cessé d’augmenter. L’épuisement professionnel est donc un problème important, qui ne peut que s’aggraver à l’avenir. Les chercheurs estiment donc qu’il est temps d’accorder plus d’attention aux plaintes d’épuisement professionnel chez les infirmières.
L’épuisement professionnel est une maladie liée au travail et causée par un stress chronique. L’épuisement professionnel peut être causé, par exemple, par un environnement de travail où la pression sur les performances est forte, par des horaires de travail irréguliers ou par le travail de nuit. Les caractéristiques de l’épuisement professionnel comprennent l’épuisement émotionnel, le sentiment d’aliénation de soi et des autres et l’impression de ne pas accomplir grand-chose au travail.
L’étude chinoise a examiné 94 études réalisées dans différents pays et a révélé qu’un tiers des infirmières dans le monde souffrent d’épuisement professionnel. Bien que le nombre de plaintes pour épuisement professionnel ait augmenté en Europe au cours des dix dernières années, le taux d’épuisement professionnel chez les infirmières en oncologie est resté stable dans le monde entier. Le burnout en Flandre
En Flandre, la proportion de travailleurs souffrant de burnout a augmenté, passant d’une moyenne de 10,2 % à 13,6 % entre 2004 et 2019. Les employés du secteur des soins sont plus susceptibles de souffrir de burnout que la moyenne ; 15,2 % des employés flamands du secteur des soins ont souffert de burnout en 2019. Seuls les employés de l’enseignement présentaient plus souvent des symptômes de burnout (21,1 %). Les employés souffrant d’épuisement professionnel étaient plus susceptibles de se déclarer malades, moins susceptibles de penser qu’ils pourraient continuer à travailler jusqu’à l’âge de la retraite et plus susceptibles d’envisager un autre type de travail. Cette situation accroît encore la pression sur le reste du personnel soignant, qui est lui aussi confronté à un risque accru d’épuisement professionnel. L’épuisement professionnel forme ainsi un cercle vicieux.
Le personnel soignant souffrait déjà en 2019, et la pandémie de corona est venue s’ajouter à cela en 2020. Par rapport à 2018-2019, la Belgique a connu une augmentation de 61,4 % du risque de burnout pendant la pandémie, selon le Burnout Assessment Tool de la KU Leuven et Securex. En Wallonie, le risque de burnout était plus d’un quart plus élevé qu’en Flandre. Un rapport du Centre fédéral de connaissances des soins de santé (KCE) sur l’épuisement professionnel des infirmiers pendant la pandémie a été publié en 2022. Il montre qu’un infirmier sur cinq présente un risque élevé d’épuisement professionnel.
Les chercheurs espèrent que la pression sur les soins n’atteindra plus jamais le même niveau que lors de la pandémie de coronaropathie. Mais étant donné que le nombre de plaintes pour épuisement professionnel était en constante augmentation avant même la pandémie, les infirmières ne semblent pas encore sorties d’affaire. Une plus grande attention portée au fardeau psychologique des infirmières pourrait être le point de départ d’améliorations et, espérons-le, de solutions au problème de l’épuisement professionnel dans le secteur des soins de santé.
L’épuisement des infirmières : contexte belge – Christine Remacle
En Belgique, le manque de personnel infirmier est généralisé.
Les conditions réelles du travail des infirmières et infirmiers liées à un contexte global ont été aggravé par la pandémie. L’impossibilité de réaliser le travail selon leur ‘codes éthiques’ a comme conséquence une perte de sens, de la démotivation, de la frustration, de la révolte et des burnouts. De nombreux jeunes infirmières et infirmiers déçus quittent les hôpitaux et autres lieux de soins.
3 chercheuses du laboratoire d’Anthropologie Prospective de l’UCLouvain ont mené une recherche qualitative anthropologique de terrain de 24 mois en wallonie, de février 2021 à janvier 2023 suite à la crise du système de soins aggravée par la pandémie COVID-19.1
Elles partent du point de vue des étudiantes et étudiants en soins infirmiers qu’elles nomment ‘les acteurs les plus invisibilisés’ du système de soins pour ensuite inclure infirmières et infirmiers.
N’oublions pas que les infirmières et les infirmiers assurent un rôle de pilier du système de soins et que les étudiants sont ‘la relève’ non seulement dans les hôpitaux mais aussi en extrahospitalier.
Cette recherche met en avant les difficultés vécues par les étudiants et étudiantes en soins infirmiers et par les professionnels existants. Le manque d’accompagnement, de supervision des étudiants sur le terrain, peu d’apprentissage technique sont des éléments démotivants. A cela vient s’ajouter la constatation des élèves infirmiers et infirmières d’une certaine violence et de la maltraitance dans les soins – paradoxe !
Il y a urgence ! Des décisions politiques, une réflexion pédagogique et managériale dans le respect des besoins et des attentes des (futurs) infirmiers et infirmières au service de l’humain pour l’humain sont impératifs pour (re)donner goût à la profession.
Dans l’ouvrage 2 né de cette recherche que vous retrouverez sur
1 https://dial.uclouvain.be/pr/boreal/objet/boreal%3A272644/datastream/PDF_01/view
différents scénarios sont suggérés par différents acteurs de terrain pour solutionner la pénurie des soignants en Wallonie.
2 Par-dessus les épaules des stagiaires : La profession infirmière. Etat des lieux et pistes pour assurer sa pérennisation écrit par Christine Grard, infirmière, enseignante et Dr en sciences politiques et sociales ; Channel Bacquet, anthropologue ; Lynca Erica Mugisha, anthropologue
Sources de l’étude
KCE. Dotation infirmière dans les soins intensifs belges: impact de deux ans de pandémie de COVID-19